L’abbé Pivet

Il y a bien longtemps qu’on a pas vu la silhouette noire d’un curé dans la vallée de la Riolle. Ils furent pourtant, et durant des siècles, des acteurs incontournables de la vie locale. Qu’on se souvienne au moins des derniers curés de notre petit pays, de ceux qui durant la dernière guerre furent nombreux, ici, à résister.

Mais bien d’autres furent « remarquables », à commencer par celui de Sepmes, l’abbé Pivet, dont la mémoire fut semble-t-il injustement salie, dont il est utile de rappeler le parcours. Une impasse de Sepmes, depuis l’ancien presbytère jusqu’au château, porte d’ailleurs son nom.

L’abbé Louis Pivet fut curé de Sepmes pendant près de quarante ans, de 1927 à 1966. De quoi en entendre bien des choses, y compris pendant l’occupation allemande, quand la commune fut au coeur d’actes de résistance, de courage mais aussi de délations.

Louis Pivet était né le 10 février 1887 à Henrichemont dans le cher. Après ses études au Petit et au Grand Séminaire, il est ordonné prêtre le 10 juin 1912, puis nommé professeur de 6e au Petit Séminaire. Avec la guerre il est affecté à l’ambulance du 2e Corps, puis détaché en 1915 au groupe des brancardiers divisionnaires de la 60e Division, puis affecté aux 124e, 324e puis 164e Régiments d’Infanterie. Il est blessé en 1916 et en juin 1918. Sa conduite lui valut la Croix de Guerre avec citation à l’ordre du régiment : « Agent de liaison près du Chef de Bataillon, d’un courage et d’un dévouement qui ne se sont jamais démentis. Dans la journée du 10 juin 1918, a assuré d’une façon parfaite la liaison avec sa compagnie sous des rafales de mitrailleuses extrêmement violantes ».

La guerre finie, il reprend l’enseignement et assure les classes de seconde et de rhétorique. En même temps qu’il enseigne, il prépare une licence de lettre et de philosophie. Le premier octobre 1922, il est nommé au Collège Saint-Maurice et, le 9 avril 1927, le voici curé de Sepmes ; jusqu’en 1966, date à laquelle, sur sa demande, il prend sa retraite.

De l’avis général c’était une personnalité complexe, paradoxale. Anticonformiste disaient certains, associant une apparence un peu raide avec une grande sensibilité et une véritable bonté. Ses paroissiens ont apprécié son assiduité auprès des malades, la gravité avec laquelle il accomplissait son ministère, son dédain des choses matérielles et son savoir, ayant acquis une réputation de savant. Il a été décrit comme « un homme un peu rude, qui fuyait la société, mais était délicat, affable et prévenant » (1)

Merci de nous communiquer d’autres illustrations de l’abbé Pivet si vous en disposez.

Sa culture scientifique et philosophique était très grande et il avait un appétit insatiable de savoir. Germanophone, il fut capable d’échanger avec les troupes d’occupation et certains habitants de Sepmes ne manquèrent pas d’y voir, à tort, une forme de soutien aux allemands. On a pu lire que l’abbé « vivait dans un monde à part et comme hors du temps, le monde des idées pures, des hautes abstractions mathématiques et métaphysiques. Ce monde était son élément, sa vie » (1) En réalité, à Sepmes comme après sa retraite, l’abbé Louis Pivet travaillait à une tâche énorme : « un essai philosophique et apologétique sur la Matière d’après les dernières données de la science ». (2). Un témoin qui le fréquentait lors de sa retraite, rapporte que Louis Pivet écrivait ce très gros ouvrage auquel « il apportait des retouches et des remaniements perpétuels, des notes et des additifs qui n’en finissaient plus…Il vivait dans la fréquentation des penseurs anciens : Platon qu’il mettait au dessus de tout et Descartes avec lequel il était en dispute… ». L’abbé avait maintes fois sollicité des éditeurs, mais en vain. Il pensait non à sa notoriété personnelle, mais à apporter une contribution à la philosophie des sciences et aux rapports de celle-ci avec la foi.

L’abbé Louis Pivet est décédé le 30 octobre 1973 à la Maison du Clergé de Tours. Ses obsèques ont eu lieu le 2 novembre, en la chapelle de la Sainte-Face, messe basse en latin et sans homélie, selon ses volontés, célébrée par Mgr Saulquin, vicaire général, chapellois bien connu de nos communes. L’inhumation eut lieu au cimetière La Salle de Tours, carré 45, tombe 162, au nom de sa mère, née Camus et décédée le 27 juin 1940.

Remerciements à Madame Eliane Fontaine pour ses informations.

Bibliographie

  1. La semaine religieuse de Tours  1973
  2. Le renouveau. Dec 1973

1 réflexion sur “L’abbé Pivet”

  1. Merci de l’évocation de l’abbé Pivet, personnage qui a joué un long rôle important dans votre petit pays. La révélation de toutes les facettes de sa personnalité complexe permettra de mieux connaître et de comprendre cet homme intéressant.

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