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Il n’est pas inutile de rappeler que le territoire de Bournan a été donné par Charlemagne à l’abbaye de Saint Martin de Tours, avant d’être cédé en 791 par Ithier (chancelier de Charlemagne) à l’abbaye de Cormery. Carré de Busserolle (1) nous précise que « c’est en 1139 seulement que nous trouvons indiquées dans une bulle du pape Innocent II, les possessions des religieux de Cormery, parmi lesquelles figure Saint-Martin de Bournan ». L’abbaye de Cormery établit à Bournan un prieuré en 1272.
L’église paroissiale Saint Martin de Bournan est le monument le plus ancien de la commune. C’est la seule église pré-romane de la vallée de la Riolle. (Fig 1 et 2)
Malgré des remaniements effectués sur plus de 1000 ans, on retrouve clairement la forme en croix des églises traditionnelles, la nef orientée vers l’orient, entrée à l’ouest (Fig 3) et le transept de direction nord-sud. Le clocher a été construit, non pas au croisement de la nef et du transept, mais au dessus du bras sud du transept, ce qui donne une asymétrie de bon aloi au bâtiment. A l’orient, une abside et deux absidioles ferment la nef et confèrent à la vue extérieure de l’église une esthétique à la fois intimiste et d’élévation. (fig 4) Si les façades nord du bâtiment sont bien visibles (fig 5), celles qui sont au sud ne le sont que dans des espaces privés (ancienne cure et jardins) (fig 6).
– La nef qui semblent bâtie au X ième siècle, a conservé une bonne partie des murs élevés en petit appareil primitif. La nef, couverte en charpente (fig 7), est éclairée au sud par trois fenêtres en plein cintre dont la plus à l’est a été refaite et agrandie. (fig 8)
– La partie orientale de l’église daterait du XII ième siècle (années 1150 environ), l’abside primitive étant alors remplacée par un transept dont le bras sud a été surmonté du clocher (fig 9), et par une abside flanquée de deux absidioles (fig 10). L’abside actuelle est en moyen appareil présentant une chape de tuileaux à un mètre cinquante du sol pour éviter la remontée d’humidité. (fig 11)
Les absidioles coiffées à l’origine par des calottes hémisphériques de pierre, sont maintenant recouvertes d’ardoise, comme l’abside, à la suite de travaux datant de 1862 (Guimas, charpentier à Ligueil)
Cette abside semi-circulaire voûtée en cul-de-four est éclairée par trois fenêtres en plein cintre (Fig 12). La fenêtre principale de l’abside, dans l’axe de la nef, est garnie d’un vitrail présentant Saint martin évêque (Fig 13) Les deux absidioles semi-circulaires, jouxtant l’abside, sont logées dans un mur extérieur de forme polygonale et précédées par une travée droite. Elles comportent également des petites ouvertures en plein cintre (Fig 14).
– Le clocher, attribué lui aussi au XII sème siècle, de plan carré, a été installé sur la partie sud du transept (Fig 15). Il présente dans sa partie supérieure un étage de fenêtres en plein cintre, à raison de deux par face, appuyées sur de courtes colonnes rondes dont les chapiteaux sont ornés de feuilles (Fig 16). A l’ouest, est incorporée une demi-tourelle cylindrique qui s’arrête au dessous des fenêtres du beffroi (voir fig 6).
La flèche octogonale en pierre qui surmonte le clocher date de la fin de l’époque gothique et a été reprise au XV ième siècle ainsi qu’en 1700 et 1761 (Fig 17). La charpente du beffroi de bois du clocher, comme celle de la nef, semblent dater des travaux du XV ième siècle. Le cinquième entraits de la charpente porte des armoiries. La cloche date du XVI ième siècle.
– Le bras nord du transept construit lui aussi au XII sème siècle, a été remanié à l’époque gothique: la chapelle est alors dotée d’une voûte à croisée d’ogive avec une clef marquée d’armoiries et d’une porte vers le nord (Fig 18 et 19). Cette porte monumentale en anse de panier moulurée est surmontée d’un vitrail évoquant Saint Martin. (Fig 20 et 21)
– La porte occidentale de l’église a été agrandie en 1767 (par René-Henri Foucher, maçon du bourg). (fig 22)
– La sacristie a été ajoutée, dans l’angle nord-ouest formé par la nef et le transept, en 1853 par Louis Detais, entrepreneur local
– A l’extérieur de la nef, sur son coté nord, est installée une épaisse dalle de calcaire dur (55 X 75 X 200cm), présentant des vestiges d’une frise sculptée, repose sur deux blocs de pierre sommairement façonnés. Cette grande pierre présentant grossièrement la forme d’un couvercle de sarcophage est dite « Pierre des morts » ou « Pierre d’attente » ou « dépositoire funéraire ». Elle daterait du XII ou du XV ième siècle et servait à déposer les morts avant la cérémonie religieuse. (fig 23)
– A l’intérieur de l’église Saint Martin de Bournan subsistent quelques éléments remarquables. Une grande cuve baptismale octogonale en calcaire sculpté, ornée de deux têtes humaines, datant du XIII ième siècle. Elle reste intéressante malgré de nombreux dommages qu’elle a subi, plus ou moins masqués par des réparations assez grossières. (fig 24) Le couvercle de bois, en forme de bulbe polygonal qui surmontait la cuve n’est plus connu que par une photographie .
Une statue de Vierge à l’Enfant, en pierre polychrome, datant approximativement de 1840, présente toutes les caractéristiques des vierges de l’époque gothique plus ancienne. Des dommages sont là encore a déplorer: le sceptre qui était tenu dans la main droite a disparu, la tête de l’enfant (de facture pour le moins originale) a été brisée puis recollée. (Fig 25) D’autre part cette statue devait former une paire avec celle de Saint Joseph qui a disparu.
Le tabernacle du maître autel semble dater de la même époque que la statue de la vierge. Ce tabernacle, qui fait partie d’un ensemble qui garnit le fond de l’abside, appartient au style néo-gothique et rappelle le grand retable de l’église saint Saturnin de Tours par ses couleurs vives et sa forme. Il comprend plusieurs dais surmontés de pinacles sculptés abritant des statuettes représentant la vierge, les évangélistes, saint Martin et saint Etienne. (Fig 26) Les broderies des vêtements liturgiques du saint évêque et du diacre martyr sont particulièrement remarquables.
Le vitrail « la charité de saint Martin », placé en imposte de la porte du transept nord, construit par les maîtres verriers Guérithault frères en 1868, illustre l’épisode fort célèbre de la vie de Saint Martin offrant la moitié de son vêtement à un pauvre grelottant de froid. Le vitrail de l’abside, illustrant saint Martin évêque est l’oeuvre des mêmes verriers.
Il existe sur le mur sud de la travée droite menant à l’abside une statue minérale polychrome de Saint Gratien accompagné d’une adolescent, vraisemblablement Saint Aventin, rappelant la légende qui localise la mort de Saint Gratien au bord de la Riolle. (Fig 27)
Cette église est classée Monument Historique depuis 1966
Compte tenu du sous sol calcaire, de la place de l’église Saint-Martin au sommet de la butte de Bournan, de la présence très proche du souterrain refuge de cette commune, il est pratiquement assuré que cette église et/ou son presbytère soient, d’une façon ou d’une autre, reliés au souterrain de Bournan.
D’autres églises ont elles existé à Bournan?
En 1878, dans son « Dictionnaire géographique historique et biographique de l’Indre et Loire », Carré de Busserolle (1) signalait à Bournan des lieux de culte disparus:
« Un document parle d’une autre église située à Bournan et qui était dédiée à la sainte Vierge. Elle tombait en ruines au milieu du XVIII ième siècle et aujourd’hui il n’en existe aucune trace. Nous ignorons à quelle époque elle avait été fondée. Il y avait dans la même paroisse deux chapelles, l’une placée sous le vocable de saint Paul, l’autre appelée chapelle Saint-Sixte. »
Par contre, ce texte de référence ne mentionne pas la chapelle Saint-Hubert dont il existe encore des traces, et qui de toute évidence devait exister en 1878. Nous l’évoquerons dans un prochain post.
Ce post est dédié à Mme Nicole Chrétien
Documents utilisés pour ce post:
- (1) Carré de Busserole. Dictionnaire géographique, historique et biographique de l’Indre et Loire (1878)
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Couderc Jean Marie. Dictionnaire des communes d’Indre et Loire. CLD, Chambray les Tours 1987
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Le patrimoine des communes d’Indre et Loire. Flohic éditions
- Dictionnaire des communes d’Indre et Loire?
- Tourainissime © site internet consacré au patrimoine de la Touraine
- Monumentum site des monuments historiques
Bonjour
Très bonne présentation de l’église.
Pour info : les deux cloches (dont une est classée) vont être mises en sécurité prochainement.
Une pré-étude pour une restauration globale de l’église débute en ce moment.
Merci
Merci de votre commentaire et l’information sur les cloches qui sont un élément crucial des églises. On entend régulièrement, jusqu’à La Chapelle Blanche, sonner les cloches de Bournan. S’agit-il d’un son enregistré ou d’un réel carillon?
L’église de Bournan, et en fait toutes les églises, méritent qu’on s’y arrête et qu’on prenne le temps de découvrir l’accumulation de savoir-faire et de civilisation qu’elles représentent. C’est un trésor à ne pas perdre et c’est pitié de voir comment nous sommes incapables d’entretenir un patrimoine que des populations bien plus pauvres que nous ont élevé, enrichi et sauvé pendant des siècles.
Bonjour,
Ce sont des enregistrements que nous entendons. Les cloches, elles, sont immobilisées depuis des années car leurs vibrations risquaient de détériorer le clocher déjà bien faible. Nous allons les descendre car elles risquent de tomber seules !!!
Nous espérons bien entendu pouvoir un jour réentendre ces cloches … Nous y travaillons.
une grande partie du sous sol de l’église n’est pas calcaire mais est constitué d’une couche d’argile peu profonde qui retient une grande quantité d’eau proche de la surface. C’est a cause de cette eau que les sols et les murs du transept sont fortement dégradés. Les anciens connaissaient certainement ce problème : on remarquez des tuiles insérées dans les murs à l’est de l’édifice.
C’est une grande chance de pouvoir bénéficier des informations que vous apportez. soyez en remercié. L’église de Bournan bien sûr mérite d’être restaurée. Mais celle de Civray sur Esves à laquelle nous consacrerons un prochain post est encore plus délabrée.