La Chapelle Blanche: 90 ans d’écart?

Comparer un point précis de la vallée de la Riolle à presque 1 siècle d’écart est un exercice stimulant pour l’observation et l’imagination.

Prenons pour aujourd’hui une carte postale du carrefour d’entrée dans La Chapelle Blanche Saint Martin ( en venant de Manthelan) datant des années 1920 ou 30. C’est le type de voiture (Fig 1 et 3) visible sur la carte postale qui me fait proposer ces dates; mais peut être les plus anciens chapelois auront-ils d’autres repères pour dater cette image.

Ce qui saute aux yeux, pour les points communs sur la carte postale des années 1920(Fig 1) et la photo de 2021 (Fig 2), c’est que les bâtiments n’ont subi que de très faibles transformations et qu’aucun nouveau bâtiment ne semble avoir été construit. Pas de destruction non plus. La similitude va jusqu’à retrouver à la même place l’Hotel Bellevue (vue sur quoi?), devenu de plus « Restaurant » alors qu’il n’était que « Café ». Pour ce qui est des bâtiments eux mêmes les modifications sont minimes: les grandes cheminées sur le toit de la maison de droite (devenue Boulangerie-Pâtisserie) ont été abattues et le crépis de façade enlevé; de plus, une des fenêtres murées de la façade est de l’hôtel, en rez de chaussée, a été ouverte. Mais les vitrines ont été réduites.

Un élément important de l’activité du bourg il y a 90 ans devait être cette pompe à essence (Fig 4)installée à la porte du Café-Hotel. Elle a bien sûr disparu aujourd’hui. Il faut aller à Ligueil ou à Sainte Maure, ou Loches pour faire le plein. Dernières pompes avant les véhicules électriques ou le retour aux chevaux?

Il faut aussi observer les « réclames » et autres panneaux indicateurs posés sur les façades des deux maisons. Sur les pans cassés des deux maisons on voit, au niveau des étages, des panneaux indicateurs des directions et des distances, qui semblent être des panneaux publicitaires Citroën ( Citroën et Michelin, marques associées, avaient misé sur une publicité centrée sur l’aide aux automobilistes).

Sur le bâtiment de l’hôtel on peut lire: Ligueil, 4,8 km, et sur le bâtiment qui lui fait face: Bournan (?)  5,4 km. Une troisième pancarte du même type est apposée à l’étage de l’hôtel, façade nord. (Fig 5)

Juste au dessus du mot Café, on distingue les anciennes plaques indicatrices des directions et distances. Elles ont presque toutes disparu, mais ont peut encore en voir à Civray sur Esves à l’entrée du bourg en venant de Bournan.

Sur les façades de l’hôtel on remarque encore la publicité pour Raphael Quinquina (Fig 6), ainsi qu’une petite enseigne illisible. Le nom du propriétaire de l’hôtel semble figurer en lettres peintes au dessus de la porte d’entrée. Enfin des queues de billards entrecroisées (Fig 7) signalent la présence d’une table qui devait servir de lieu de rencontre pour les jeunes du village. Ces queues de billards étaient encore visibles sur le mur avant la dernière réfection du bâtiment.

La comparaison purement esthétique des deux devantures de « l’hôtel Bellevue » n’est vraiment pas à l’avantage de l’hôtel de 2021: alors qu’il existait une harmonie graphique des lettres peintes désignant le commerce, les enseignes d’aujourd’hui, disparates, semblent bien ternes. Les vitrines avec leurs stores, plus grandes, plus chaleureuses, plus hautes, donnaient à l’établissement ancien un aspect accueillant que les fausses pierres d’encadrement et les rideaux d’acier ont maintenant dépersonnalisé. Ce qui est fort dommage quand on connait la qualité d’accueil des gérants actuels de l’hôtel Bellevue et de son restaurant, remarquable à bien des égards. Mais c’est ainsi, et ce n’est pas l’enseigne de la poste, ni la petite enseigne pendue au dessus de la porte, ni la publicité pour une bière, ni les jardinières à mi-hauteur des vitrines qui redonneront le charme perdu de la devanture si attirante de ce « café » de l’entre deux guerres.

En fait, c’est toute l’image des années 20 qui respire la vie à coté de celle d’aujourd’hui. Et il y a bien des raisons. D’abord ces stores métalliques fermés pour cause de Covid. Et puis la présence des 20 personnes sur la carte postale ancienne alors qu’aucune ne se voit sur la photo 2021. Bien sûr l’auteur de la carte postale a du demander à tous les habitants du coin de sortir pour être visibles sur la carte postale. Mais si on le demandait aujourd’hui combien de personnes seraient sur la photo? Et puis sur la carte postale on voit des personnes de tous les âges, et même des chiens…(Fig 8) Un vrai village quoi, avec des cafés à tous les coins de rues (le bâtiment du coin opposé au Bellevue abritait le « Café du centre »).

Au crédit de l’image d’aujourd’hui: la dissimulation des lignes électriques aériennes, des façades ravalées, une boulangerie pâtisserie dans le bâtiment de droite (malheureusement fermée au moment de la photo)…mais est-ce suffisant pour effacer le sentiment d’un village endormi.

Serait-il possible de refaire une carte postale, aujourd’hui, au même endroit qui donnerait la même impression de vie que celle des années 20?

2 réflexions sur “La Chapelle Blanche: 90 ans d’écart?”

  1. Intéressante comparaison. A-t’on une idée du nombre d’habitants à l’époque ? Car au delà du ressenti provoqué par les photos, il y a de manière factuelle la population de cette petite ville. A t elle augmentée ou diminuée ? ou sont-ce les modes de vie qui ont changé ?

    1. Il y avait une centaine d’habitants de plus sur la commune de la Chapelle Blanche Saint Martin au moment de la première photo. Je pense qu’il y a eu, d’une part, une perte d’habitants, mais aussi une quasi disparition des commerces, artisans, et activités de centre-bourg. L’évolution des modes de vie a transformé nos petits villages en zones « périphériques » des espaces de création de richesse. Les Métropoles « aspirent » les bras, les cerveaux, et les moyens financiers. Les campagnes, quand elles ne sont pas structurées pour la production agricole, deviennent des espaces « dortoirs » peu identifiables ou des terrains « vagues » où les prédateurs de l’écologie peuvent « vendre » des éoliennes, des déchèteries, ou des « center parks »…Mais les centres bourg restent toujours aussi déserts.

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