Notre Chapelle-Blanche s’appelle Saint Martin. A cause de Saint Martin et de ses miracles ; dont ce blog se fera un jour l’écho. Pour aujourd’hui, nous reproduisons un passage d’une conférence que fit Marcel Girard au sujet de « l’image de la Touraine à travers le monde », en 1988, à l’Académie des sciences, arts et belles lettres de Touraine. Par ce texte, la petite commune de la Riolle rejoint l’histoire la plus profonde et la géographie la plus large.
Marcel GIRARD est né le 12 août 1916 à Tours. Fils de René Girard, typographe, et de Louise Tombe, Il épousa, le 4 août 1942, Mlle Camille Guénin dont il eût 4 enfants. Il est décédé le 05/11/2006. Après des études au Lycée Descartes à Tours, puis à la Faculté des lettres de Paris et à l’Ecole normale supérieure, il fut Agrégé de lettres. Ses activités professionnelles, très ouvertes sur le monde, donnent un relief particulier au thème de sa conférence. D’abord professeur au lycée d’Orléans (1942-45) puis à l’Institut français et à l’université de Prague (1945-51), directeur des cours d’enseignement supérieur à l’Institut français de Londres (1951-57), Conseiller culturel près l’ambassade de France en URSS (1957-62), près l’ambassade de France aux Pays-Bas et Directeur de la Maison Descartes à Amsterdam (1962-63), Conseiller culturel en République populaire de Chine (1964-65), Conseiller culturel et de coopération technique au Liban (1965-72) puis près l’ambassade de France à Alger (1972-76), Inspecteur général de l’Education nationale (Lettres) (1972-82).
« La première image de la Touraine qui s’est imposée au monde revient à Saint Martin. Saint Martin de Tours : voilà comment fut connu dès l’origine le saint évêque évangélisateur des Gaules. Son action et sa gloire ont rapidement gagné l’Europe entière. Vous comprenez bien que Tours en a bénéficié, surtout quand Marmoutier devint le foyer rayonnant que l’on sait, d’où essaimaient les intellectuels et les missionnaires. A l’époque d’Alcuin, nous étions en relations avec les principaux centres de l’empire de Charlemagne, Aix-la-Chapelle, Mayence, Fulda, Salzbourg.
On a donné le nom de Martin à quantité d’églises qui lui sont dédiées et qui rappellent toujours, par quelque inscription ou par quelque peinture, qu’il a œuvré et qu’il est inhumé à Tours: 4 000 églises en Allemagne (autant qu’en France), 260 en Belgique, 76 en Hollande, 163 en Angleterre (vous connaissez tous Saint Martin in the Fields), une centaine en Hongrie, plus de 60 en Bohême, et en Italie, en Espagne, au Portugal, bien sûr, à proportion. Vous vous promenez sur la côte sud de l’Angleterre, près de Hastings. L’abbaye que Guillaume le Conquérant construisit sur le champ de bataille, est une fille de Marmoutier et elle est vouée à Saint Martin, de même que la Sainte Trinité de York ou le Prieuré de Tickford près de Lincoln. N’allez pas croire que ce culte appartienne exclusivement au passé. En 1951, aux Philippines, quand on a édifié la grande basilique qui est censée protéger la ville de Taal, dans l’île de Luzon, contre les éruptions du grand volcan qui la domine, on l’a mise sous le patronage de notre Saint Martin. La grande ville de Buenos-Aires lui est vouée depuis sa fondation. Quand vous vous trouvez sur la Place de Mai, là même où pendant la dictature tournaient chaque jeudi, à partir de trois heures de l’après- midi, les épouses et les mères des disparus, vous apercevez le début d’une longue rue toute droite qui traverse ensuite les vieux quartiers de la cité. Le Tourangeau éprouve une certaine émotion quand il lit sur une plaque de fonte, au coin de cette rue: rua Saint-Martin-de-Tours. A Tours même, il n’existe plus de rue Saint-Martin depuis le XIX e siècle. Il faut donc aller en Argentine pour trouver associés dans le même hommage son nom et le nom de sa ville. Un jour du printemps de 1948, j’ai débarqué dans la petite ville de Turciansky Svaty Martin, enfoncée dans le creux des Carpathes, au fin fond de la Slovaquie. C’est le siège de la Matica Slovenska, organisation culturelle patriotique, qui veille à l’identité et à l’indépendance du peuple slovaque. Turciansky Svaty Martin: Saint Martin des Turcs… Là-bas, on n’est pas très loin de la Hongrie, de la Pannonie antique, où Saint Martin serait né en l’an 316. C’est sans doute pourquoi on a donné son nom à cette bourgade, bien que la population soit en majorité protestante, calviniste plus exactement. Les autorités tchécoslovaques l’ont débaptisée récemment: on a effacé la mention Turciansky, qui rappelait que les Turcs étaient venus jusque-là. Puis on a supprimé Svaty. Si bien que sur les cartes on ne lit plus que Martin. Eh bien ! quand je suis arrivé et qu’on a appris que j’étais né à Tours, on m’a fait la fête comme à un enfant du pays. On connaissait bien notre ville, plusieurs personnes avaient visité, entre les deux guerres, le tombeau de Saint Martin. Tout cela était resté vivant dans leur esprit, parce qu’y vivait toujours, profondément, le message du grand apôtre tourangeau et européen.
Des millions et des millions de personnes à travers le monde se nomment ou se prénomment Martin, à la française, comme dans les pays germaniques et anglo-saxons, ou sous d’autres graphies italiennes ou espagnoles. C’était le cas de Martin Luther, du libérateur de l’Amérique du Sud San Martin, et de tant d’hommes célèbres dont cinq papes, par exemple le pape Martin IV, qui était originaire de Ballan. Je ne dirai pas que tous les Martin, Martino, Martinez, etc… se sentent des attaches avec la Touraine, mais on peut présumer au moins que le nom de Tours ne leur est pas complètement étranger. »
A la Chapelle-Blanche Saint Martin, même si la Riolle ne fait pas le tour de la planète, on peut se trouver des attaches avec le monde entier. Merci Mr. Girard.
Excellent ! Encore MERCI pour toutes ces connaissances partagées !
vous connaissez sans doute la belle réflexion qui affirme que les connaissances, plus on les partage, plus on en a. Alors pourquoi se priver?
Merci de votre visite sur le blog.