Bournan il y a un siècle

Les cartes postales anciennes de nos petits villages sont toujours émouvantes. D’une part elles matérialisent la permanence des bâtiments et rues que nous voyons tous les jours. Mais d’autre part, en mettant en évidence les changements d’affectation des maisons, ou la variation des véhicules, ou des équipements communaux, elles montrent que tout change pour que le petit village demeure. En sera-t-il toujours ainsi ? L’église qu’on voit sur les images ci-dessous, date du XIIe siècle. Sera-t-elle encore visible sur des images dans 8 ou 9 siècles ? Bournan existera-t-il encore ? Au rythme où vont les choses et les mutations, il n’y a pas grand risque à répondre négativement à ces questions. Raison de plus pour prendre le temps de regarder, à un siècle de distance, ces deux images de Bournan. Et puis il y à les gens. Ceux qui figurent sur cette carte postale des années 1920 et qui ont disparu. Peut-on éviter de penser à eux ?  Combien de générations de leurs parents ont-elles vécu avant eux à Bournan ? Que serait Bournan aujourd’hui s’ils n’y avaient consacré leurs existences? Ce sont les hommes qui font les villages.

Cliquez sur les images pour les agrandir. Les refermer en cliquant sur la croix en haut à droite. 

L’observation de ces deux images, prises au même endroit, à un siècle de distance, montre que certaines choses n’ont peu ou pas été affectées par le temps. Les bâtiments principaux sont toujours en place: l’ancien presbytère (second bâtiment sur la gauche) est devenu la Mairie. Le Café de la Place reste un café, même si on lui a adjoint une épicerie (la seule qui reste à Bournan qui en comptait au moins 3 un siècle plus tôt). La dernière maison à gauche était l’école de Bournan avant que la nouvelle fut construite en 1905 ; celle qui est toujours en activité. Et puis il y a, juste à côté,  cette façade blanche sur laquelle on croit lire encore l’intitulé d’un café. S’agissait-il déjà du café de l’Agriculture dont le fronton est encore visible sur la photo de 2023 ? Cette maison présente aussi une devanture de magasin. Que vendait-on là ? Etait-ce déjà l’entrée du cinématographe ?

Sur ce coté gauche de la route qui conduit de la Chapelle Blanche à Sainte-Maure, en passant par Sepmes, deux automobiles cabriolets, contribuent à dater la photo. Une publicité pour le chocolat Menier est visible sur le pignon de l’autre côté de la « grande rue ». Mais on ne distingue pas l’objet du panneau octogonal qui la jouxte. Six personnes et un chien animent la scène: surtout cette très jeune enfant, à gauche, observateur immobile et sage d’un monde en suspend.

Au fond, au milieu de l’image, le monument aux morts, tout neuf. Il est bien visible, blanc, encore non masqué par les arbres qui ont été plantés autour. 17 noms gravés rappellent à cette commune de 450 habitants que 17 des jeunes hommes du village viennent de disparaître en croyant sauver leur patrie. Pourtant, Bournan existe encore, la seconde photo le montre. Un Bournan propret, avec les réseaux électriques enterrés, la route asphaltée et les trottoirs bien établis. La végétation égaie l’espace: que ce soit la vigne-vierge sur la façade du Café de la Place, les arbustes et les rosiers bien plantés face à la mairie, ou les valérianes sauvages qui poussent au long du mur de droite. Les voitures n’ont plus rien à voir avec les guimbardes du siècle précédent. Le clocher, bien qu’en mauvais état, est toujours là.

Quelle photo pourrait être prise au même endroit en 2124, après un siècle où la folie de la libre circulation des marchandises, de l’argent et des hommes, aura lessivé la planète?

8 réflexions sur “Bournan il y a un siècle”

    1. Suzanne BOULEVARD

      Merci beaucoup d’avoir pris le temps de lire ce post et de nous avoir fait connaître votre sentiment. Nous y sommes sensibles. Et bravo pour tout le travail de mémoire que vous faites avec les amis du patrimoine de Sainte-Maure et de sa région!

    1. Suzanne BOULEVARD

      Il faut croire que Bournan, et notre belle campagne, existeront encore dans un siècle. Mais du train où vont les évolutions, compte tenus des enjeux économiques globaux de la mondialisation, et tout bien pesée la puissance destructrice des armes des prochains conflits, il faudrait quand même beaucoup de chance pour qu’un voyageur puisse refaire dans 100 ans une photo du même endroit illustrant une certaine permanence. Croisons les doigts et merci de votre commentaire.

  1. Bonjour, et merci pour ce travail remarquable, je montre à mes enfants et me documente grace à vous. nous vindrons un jour visiter.
    Merci encore

    1. Suzanne BOULEVARD

      Merci de votre visite et de votre commentaire.
      C’est toujours intéressant de regarder attentivement les cartes postales anciennes. Il y a mille choses à observer.

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