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Des quatre églises des villages de la Riolle, l’église de Civray sur Esves Saint Rémi (parfois orthographiée Saint Rémy), et celle de Bournan, figurent dans le livre de Marcel Deyres sur les « Belles églises de Touraine ». Il faut dire que l’église de Civray sur Esves est étonnante à bien des points de vue, et qu’elle fut inscrite aux monuments historiques en 1926. Elle domine littéralement le bourg de son puissant clocher, flanqué d’une abside massive, à l’orient, et d’une tourelle d’escalier à son angle nord-ouest. Mais, paradoxalement, sa nef est assez petite. (Fig 1) De plus, son entrée latérale par le sud rend cette église bien différente du schéma consacré de l’entrée par la nef, à l’occident. La construction de cette église à débuté au XII° siècle pour ce qui concerne la nef et la partie inférieure du clocher. Elle a été remaniée au XV° siècle.
En fait, ce qui saute aux yeux c’est la dimension très importante du clocher qui supporte la flèche, et ses proportions vis à vis du reste de l’édifice. Ce clocher, du XII° siècle, surdimensionné, est plus grand que la flèche. Il se présente comme une tour d’allure extérieure carrée dont les quatre angles sont soutenus par des contreforts massifs (Fig 2), laissant à penser que le projet initial devait envisager la construction d’une nef plus importante ainsi que des transepts ou des chapelles latérales. Ce clocher est percé de deux fenêtres en plein cintre sur chacune de ses faces, dans leur partie haute (certaines sont en partie obstruées). A son coté, la nef parait toute petite, à peine le double de l’espace compris dans le quadrilatère du clocher; quant aux transepts ils semblent n’avoir jamais vu le jour.
Cette caractéristique architecturale, ajoutée aux faits que l’église est en partie incluse dans des bâtiments (ancien presbytère et sacristie) sur sa façade nord sans fenêtre, et aveugle à l’ouest, donc sans esplanade d’entrée comme pour les églises comparables, font que l’allure générale extérieure de Saint Rémi pourrait faire penser à un édifice de défense. (Fig 3 et 4)
Les premiers travaux semblent avoir concerné la nef, dès le début du XII° siècle. Elle est constituée de travées, à peine éclairées par deux petites fenêtres en plein cintre tout en haut de la façade sud. La porte d’entrée lorsqu’elle est ouverte donne un peu de lumière au fond de la nef. (Fig 5 et 6)
La lumière de l’est, très largement accueillie par les trois grandes fenêtres à remplage flamboyant de l’abside, est en réalité une des caractéristiques de Saint Rémi. Le fait que pratiquement tous les vitraux aient été remplacés par du verre blanc accentue encore cette luminosité. (Fig 7 et 8) Il ne reste qu’un modeste vitrail représentant un buste de Saint Rémi (XIX° siècle), et deux petits vitraux du XV° siècle (dans les flammes de la fenêtre du chevet) symbolisant les évangélistes Saint Marc (un lion) et Saint Luc (un boeuf). (Fig 9)
En fait, cette luminosité est la conséquence des travaux réalisés au XV° siècle. A cette époque, la troisième travée, comprenant la croisée sous le clocher, a été refaite, exploitant des liernes moulurées avec deux larges gorges, montantes jusqu’à la clef de l’arc, sans l’intermédiaire de chapiteaux. (Fig 10, 11, 12 13) Cette disposition architecturale pousse le regard vers le haut et amplifie la circulation de la lumière apportée par l’abside construite à la même époque du gothique flamboyant. Ces deux arcs qui délimitent la travée sous le clocher, avec leur mouluration à deux gorges (fréquente sur les fenêtres des églises tourangelles du flamboyant), constituent en réalité, en tant que piliers sans chapiteaux, une prouesse technique que Marcel Deyres souligne ainsi: « c’est le moment et le lieu d’admirer la maîtrise et la simplicité des moyens dont les architectes du XV° siècle savaient user ».
C’est aussi au XV° siècle qu’est construite l’abside semi-circulaire dont la hauteur et l’amplitude des fenêtres magnifient ces deux liernes. L’abside est couverte, en extérieur, d’une demi-coupole peu esthétique (et obstruant pour partie les fenêtres du clocher à l’est). A l’intérieur, au contraire la voûte de forme originale est assez élégante et répond à la croisée du clocher. Et c’est bien entendu pitié de voir comment la fausse voûte en plâtre de la nef vient détruire l’harmonie qui existait depuis le choeur. (Fig 14, 15, 16)
Il faut dire que cette malheureuse nef a vu son toit s’effondrer lors d’un ouragan en 1783, entrainant la disparition de la voûte en pierre. Deux ans plus tard la toiture fut reconstruite, plus basse que la précédente (on voit encore sa trace sur le mur ouest du clocher) et la voûte en pierre fut remplacée par une voute en bois avec arbalétriers et tirants. D’autres travaux datent de cette époque, en particulier la réparation de la flèche et de l’escalier du clocher. Cette flèche polygonale est typique des flèches de la région et comporte des fléchettes aux 4 angles (Fig 17, 18)
Le presbytère fut construit en 1862, tout prêt du clocher et ne laissant la place que pour une minuscule sacristie réunissant les bâtiments. Cette sacristie semble avoir été construite devant une seconde entrée latérale. On distingue encore cette porte en anse de panier avec des amorces de pieds-droits composés de six moulures de part et d’autre. A coté de cette porte se trouve la très étroite porte donnant accès à la tourelle de l’escalier du clocher. (Fig 19, 20 et 21)
La foudre qui endommagea encore Saint Rémi en 1874 entraina de nouveaux travaux sur le clocher, la flèche, et la tourelle d’escalier. 19m3 de pierres neuves furent encore apportées en 1964 pour renforcer l’édifice. Malgré tous ces efforts d’inquiétantes fissures sont présentes dès qu’on lève les yeux vers les voûtes, tandis que des entrées pluviales menacent la voûte de la nef. D’importantes restaurations sont donc a envisager pour préserver l’architecture originale de Saint Rémi. (Fig 22 et 23)
Le mobilier de l’église Saint Rémi est assez restreint. Une statue en pierre polychrome de la vierge et l’enfant d’une hauteur de 1,20m (copie du XIX° siècle d’un modèle du XIII ou XIV° siècle) présente un déhanchement visant à donner une certaine grâce au personnage. Cette statue est placée devant un retable néogothique en bois (des années 1840) disposé coté nord de la croisée. Faisant face, dans une niche reprise dans le mur sud du clocher, se trouve la statue en pierre (ou plâtre) de Saint Joseph. (Fig 24, 25 et 26)
Un tabernacle en bois peint est disposé au fond de l’abside. Il s’agit vraisemblablement d’une copie d’un élégant modèle du XVII° siècle. Ses colonnes dorées lui donnent l’apparence d’un petit temple dont le dôme est pourvu d’un toit à écailles. Le Christ à outrages (doré) qui décore la porte du tabernacle est de belle facture. (Fig 27 et 28)
Un chemin de croix est composé de toiles encadrées d’assez grandes taille, surmontées d’une croix. Il est bien visible sur la Fig 5.
L’église comportait un tableau représentant la Sainte Famille et Saint Jean Baptiste, vraisemblablement du XVII° siècle. Il a été inscrit aux monuments historiques et restauré. Il figure maintenant à la mairie de Civray dans la salle du conseil municipal.
Il faut encore signaler un baptistère circulaire d’environ 70cm de diamètre, en calcaire, muni d’un couvercle en bois portant un crucifix, posé sur un socle en pierre de forme atypique. Il est disposé dans l’angle nord ouest de la nef. La porte au sud donne accès à la nef en descendant trois marches dont l’une porte un bénitier cylindrique assez haut, taillé dans une seule pierre calcaire. (Fig 29 et 30) Sur le chevet de l’église, dans un des contreforts de l’abside, une petite niche sculptée au XVI° siècle abritait la statuette d’un saint. Elle a aujourd’hui disparu. (Fig 31)
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